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Traduire Camilleri

Tiens, pour une fois, on va pas causer politique (quoique). Demain, la revue Micromega publie un numéro entièrement consacré à Camilleri. En exclusivité pour les lecteurs francophones, le premier paragraphe de mon article (avec mon propre titre, qui n'a évidemment pas été retenu par la rédaction)


Traduire Camilleri, transposer son monde

Par Serge Quadruppani

Ma rencontre avec l’œuvre d’Andrea Camilleri advint pour la première fois en 1997, chez Maruzza Loria, sicilienne exilée à Rome comme le Maestro, et qui a réalisé pour le Giornale di Sicilia une de ses premières interviewes sur son travail d’écrivain. Maruzza, qui est toujours ma traductrice et une très chère amie, était alors ma compagne, et c’est à travers elle que j’ai découvert et appris la langue italienne (malgré les origines de ma famille, on ne parlait que français à la maison). Je piochais alors dans sa riche bibliothèque avec une ardeur qui n’était pas sans rappeler cette époque de ma prime adolescence, quand, rejeton d’une famille prolétarienne, j’eus le bonheur de plonger dans les livres d’un parrain aux goûts éclectiques. Chez Maruzza, je m’appropriais la langue et la culture de mes ancêtres comme trente ans plus tôt, la langue et de la culture qui m’avaient vu naître. C’est ainsi que le hasard me fit poser la main sur La Stagione della Caccia et je le lus comme je lisais le reste : en avançant dans la jungle de signifiants luxuriants aux parfums énigmatiques avec les bottes de sept lieux de l’imagination et la machette du dictionnaire  - et n’oublions pas la guide, Maruzza. En raison de ma connaissance encore sommaire de l’italien, si je remarquais bien que l’auteur utilisait d’étranges tournures et que sa syntaxe était quelquefois surprenante, et s’il y avait beaucoup de mots dont je devais deviner le sens grâce au contexte, je n’eus pas de difficulté particulière à le lire. C’est ainsi que je suis entré dans le camillerese : comme un enfant qui apprend globalement une langue - en l’occurrence, une variante de l’italien méridional.
 


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